Distribution : Maif réinvente ses agences
Toulouse est l’une des quatre villes choisies par l’assureur mutualiste pour tester sa nouvelle « stratégie des lieux ». Objectif : capter dans ses agences relookées une clientèle plus jeune et plus urbaine. Reportage.
Géraldine Dauvergne
\ 17h16
Géraldine Dauvergne
Finies, les bornes d’accueil. Disparus, les bureaux moroses, disposés derrière les parois vitrées, si caractéristiques des délégations des années 2000 … L’agence Maif de la rue Alsace Lorraine, à Toulouse, a maintenant des airs de boutique, avec ses casques de vélo d’un rouge ardent en vitrine, et le bar à café de son « triangle d’accueil ». L’ambiance se veut détendue, et surtout décalée par rapport aux codes de la profession. Un peu trop peut-être ? Une personne âgée entre, puis hésite à avancer davantage dans ces lieux que, manifestement, elle ne reconnaît plus. « Il y a un effet de surprise », reconnaît en souriant la manager, Stéphanie Caparros, qui s’est approchée d’elle pour la guider. Les sociétaires qui viennent en rendez-vous sont orientés vers un « studio conseil » au design épuré. Quant aux collaborateurs, ils s’adaptent aux codes du retail, et travaillent debout.
Une délégation fermée, deux nouvelles adresses
Sur les trois délégations historiques de Maif dans l’agglomération toulousaine, celles de Ramonville-Saint-Agne et de Toulouse-Alsace Lorraine, implantées depuis une trentaine d’années, ont été conservées. « Notre délégation conseil située rue d'Alsace-Lorraine est l’une des plus visitées de France », explique Florent Villain, directeur de la distribution omnicanale. Mais celle de Blagnac a été fermée. Vaste de 800 mètres carrés, elle n’accueillait plus qu’une dizaine de collaborateurs. « Les emplacements toulousains n’avaient jamais vraiment fait l’objet d’une remise en question jusqu’à présent, » souligne Florent Villain.
La mutuelle historique des enseignants s’est en revanche offert deux nouvelles adresses toulousaines. Elle a soigneusement évité la rue de Metz, où se trouvent traditionnellement les assureurs. La « vitrine de l'écosystème » a ouvert ses portes au 15, allées Jean Jaurès, dans les anciens locaux d’Air France. Les 300 mètres carrés, répartis sur deux niveaux, se découpent en plusieurs univers : un espace dédié à la relation client, un carrefour communautaire intégrant associations et entrepreneuriat local. Une « galerie des moments de vie » présente l’offre assurantielle autour des thèmes des déplacements, de l’habitation, de la famille, de l’épargne. « Nous voulons proposer une expérience d’accueil différente, souligne Florent Villain. La circulation dans les lieux permet de découvrir les offres. » Sur des étagères sont exposés des objets, conçus par des partenaires locaux, en rapport avec l’activité de l’assureur ou avec ses engagements écologiques : tee-shirts anti-noyades, vélos, protections et casques, antivols, extincteurs, éléments de domotique, seau à compost, oyas de terre cuite.
A quelques kilomètres de là, au cœur d’un éco quartier, les Halles de la Cartoucherie abritent un autre nouveau point d’accueil toulousain de l’assureur mutualiste. Dans d’anciens ateliers industriels réhabilités, ce tiers-lieu hybride accueille métiers de bouche, espaces de coworking, installations sportives, et activités culturelles. Maif a installé sur une mezzanine un espace de 50 mètres carrés plutôt insolite. La mutuelle est la seule société de service de l’endroit. « Les curieux sont attirés par les objets, constate Virginie Cubaynes, conseillère « face à face », arrivée chez Maif à l’ouverture des centres d’appels téléphoniques, en 2000. En prenant part aux animations des commerçants et des artistes de la Halle, nous découvrons nos sociétaires dans un autre contexte. » Ici, la difficulté est pourtant bien de se signaler … sans vitrine, ni enseigne. La semaine précédente, des SMS ont été envoyés aux sociétaires pour les inviter à passer prendre un café. L’initiative a rencontré un certain succès.
Une réorganisation des équipes
Le redéploiement des agences s’accompagne d’une réorganisation du temps de travail. Les trente collaborateurs et les trois managers de la métropole toulousaine "tournent" désormais chaque semaine, entre les quatre sites. A la Cartoucherie et à Jean Jaurès, on teste l’ouverture le samedi après-midi. « Cette nouvelle organisation nous permet de voir tous nos collègues de la métropole, ce qui n’arrivait pas auparavant », apprécie Seher Rouillier, conseillère « face à face », fan de ce « concept store assurantiel ». Les contrats de travail ont été modifiés par des avenants pour un an, le temps de l’expérimentation, avec la possibilité d’opter pour du temps partiel choisi, et du télétravail. Les plannings sont assez complexes. « Il faut bien vérifier chaque jour l’agence où on est attendu, et les horaires », lance un collaborateur. Mireille Nonnon n’a vu qu’une seule personne de son équipe cette semaine, ce qui est à la fois nouveau et un peu déconcertant. Mais elle est référente dans un domaine qui lui est cher : l’événementiel et les partenariats. « Actuellement, j’organise un job dating, et je propose des animations pour faire venir les gens. » Au-dessus du bar d’accueil figure en bonne place l’agenda des événements, conférences, ateliers et expositions proposés aux visiteurs : « lunettes virtuelles : tout savoir sur les mobilités douces », « parcours vélos dans les rues toulousaines avec vos enfants », exposition photo « osez le voyage à vélo, avec la famille Catel » …
« Nous attendons une progression des visites à deux chiffres sur un an, dévoile Florent Villain. Nous voulons renforcer la complémentarité entre digital et agence. » En 2021, seuls 19% des assurés se sont rendus dans leur agence d'assurance. « Depuis le Covid, la baisse de la fréquentation est considérable, de l’ordre de 40 %, souligne Pascal Demurger, directeur général de Maif, venu rendre visite à ses équipes toulousaines. La solution choisie habituellement par les assureurs est de fermer les agences, ce qui contribue à la désertification des centres villes. Ce n’est pas notre philosophie. Nous, nous allons les transformer, avec une forme de simplicité, de sobriété commerciale, sans vente forcée. Le but est de permettre à nos collaborateurs de faire du conseil et de la gestion de sinistre de qualité. »
Florent Villain, directeur de la distribution omnicanale et Pascal Demurger, directeur général de Maif, dans la nouvelle agence des allées Jean Jaurès à Toulouse.
Une expérimentation qui reste à valider
Avec Toulouse, Lille, Rennes et Anglet font partie des quatre villes choisies par l’assureur pour expérimenter la nouvelle « stratégie des lieux » nationale, afin de capter une clientèle plus jeune et plus urbaine. La rénovation des agences de la société d’assurance mutuelle dans les quatre villes coûtera environ 7 millions d’euros, sur trois ans. « L’enveloppe globale allouée aux travaux ne sera pas majorée par ce projet, et en charges récurrentes les fermetures compensent l’ouverture de nouvelles adresses », indique Florent Villain.
Un bilan sera fait en fin d’année, pour décider de la pérennisation de l’opération. « L’expérimentation va nous dire si c’est le bon format pour réussir », précise Pascal Demurger. Si le feu vert est donné, le concept sera déployé d’abord dans une douzaine de villes de plus de 700 000 habitants, voire à Paris et en Ile-de-France, où se trouve une bonne part des sociétaires de Maif, et du potentiel de nouveaux clients. Soit un tiers environ du réseau de Maif, composé de 156 agences et délégations conseils en France.
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