Assurtech, la fin prochaine d'une start-up américaine emblématique
En 2019, l’assureur américain Prudential faisait l’acquisition d’une assurtech pour un montant record et, depuis, toujours inégalé. Cinq ans plus tard, l’histoire ne s’est pas poursuivie comme escompté…
Gwendal Perrin
\ 08h21
Gwendal Perrin
L’écosystème assurtech est fragilisé depuis deux ans par l’assèchement des levées de fonds, des quêtes de rentabilité plus ou moins difficiles et, conséquence, de ces deux points, plusieurs de ces start-up de l’assurance ont dû mettre la clé sous la porte.
Mais c’est bien avant cette crise économique que l’assureur américain Prudential avait, en 2019, fait l’acquisition de l’assurtech Assurance IQ pour un montant de 2,35 milliards de dollars, soit plus de 2,1 milliards d’euros. Aucun autre rachat d’assurtech n’a jamais atteint un tel montant depuis.
Des doutes sur la pertinence du rachat dès 2022
Cette société fondée en 2016 à Seattle (Washington) avait deux particularités. Son modèle, tout d’abord, qui consistait à proposer des offres personnalisées d’assurance grâce à la data science – en 2019, il était estimé que près de 17 millions d’américains en avaient déjà bénéficié. Son financement, ensuite : Assurance IQ, avant son rachat par Prudential, n’avait en effet jamais levé de fonds.
Cette opération de tous les superlatifs a toutefois connu rapidement quelques anicroches. Dès 2022, le Wall Street Journal pointait du doigt des résultats bien inférieurs aux attentes de la filiale, tant et si bien qu’un représentant de Prudential admettait dans le célèbre journal qu’il considérait « que nous aurions pu payer moins (NDLR : que les 2,35 milliards de dollars versés) ». Alors qu’un chiffre d’affaires d’environ un milliard de dollars était escompté en 2021, le résultat réel était alors deux fois moindre (558 millions de dollars)…
L’histoire ne s’est pas arrêtée là. Alors qu’Assurance IQ était parvenu à renouer avec les bénéfices sur le quatrième trimestre 2022, à partir de là, Prudential a tout simplement arrêté de délivrer des informations financières sur sa filiale à compter de 2023. Par la suite, ce sont les effectifs d’Assurance IQ qui ont été progressivement réduits, avec un plan de départs de quelque 112 collaborateurs sur un millier d’employés annoncé en interne le 5 janvier 2024. Enfin, une plateforme de distribution lancée en 2021 par Assurance IQ nommée « Nectar » a stoppé ses activités le 22 janvier dernier.
Près d'un millier d'emplois en danger à court terme
La publication des résultats financiers de Prudential Financial pour le premier trimestre 2024 faite fin avril n’augurait, elle non plus, rien de bon : y était en effet évoquée, dans le déroulé des pertes nettes enregistrées, une mention à Assurance IQ pour souligner « 38 millions de dollars de pertes avant impôts liées aux cessions et à l'exploitation des activités, y compris une perte d'Assurance IQ basée sur la décision de se retirer de l'activité ». Une cessation d’activité prochaine est confirmée par des courriels de dirigeants de Prudential interceptés par la presse spécialisée américaine mais aussi, désormais, sur le site même de l’ex-assurtech.
« Assurance IQ ne sert plus de nouveaux clients. Si vous disposez actuellement d’un contrat via Assurance IQ, rassurez-vous, ce changement ne vous impacte pas. Votre plan ne changera pas et nous continuerons à vous aider à comprendre et à naviguer dans les avantages pour le moment. Cela a été notre privilège d'aider, d'améliorer et de protéger votre bien-être personnel et financier au cours des 8 dernières années », y est-il désormais affiché. Selon « Coverager », l’activité sera stoppée dans les trois mois à venir et la majorité des salariés encore présents chez Assurance IQ devrait être licenciée.
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